« Les glaciers au Svalbard ne font que fondre »

Au Svalbard, un archipel norvégien situé dans l’Arctique, 60% des 61 000 km² de territoire est composé de glaciers. Ses situations géographiques et géologiques en font un des endroits de la planète les plus sensibles au réchauffement climatique. Buzzles s’y est rendu.
Chaque été, de plus en plus de blocs de glace issus des glaciers fondent dans le fjord. (Crédit photo : Eloïsa Patricio)
Cette année encore « les prédictions sont mauvaises », annonce Léo Decaux d’un air fataliste. Cet étudiant en environnement et géophysique étudie depuis un an les glaciers du Svalbard, à l’université de Longyearbyen. Avec près de 2 000 habitants, cette ville est la capitale administrative du Svalbard. Entourée de montagnes rougeâtres en été et complètement blanches en hiver, surplombée au Sud par ses deux glaciers ; la ville, dans laquelle trônent encore les anciennes mines de charbon aujourd’hui à l’abandon, paraît isolée. Le paysage est lunaire. Et l’environnement est très sensible au réchauffement climatique, dont les premières victimes sont les glaciers. « Les glaciers sont les meilleurs indicateurs du réchauffement climatique car ce sont eux qui réagissent le plus vite », informe Léo Decaux, avant de continuer : « actuellement, tous les glaciers dans le monde, sauf deux, ont un bilan de masse négatif. Les glaciers de Svalbard ne font que fondre ».
Concrètement, cela signifie que la neige accumulée durant l’hiver, qui deviendra ensuite de la glace, ne suffit plus pour permettre au glacier de grandir. « La zone d’accumulation est presque inexistante cette année ou alors elle se trouve sur les hauts sommets. Quasiment toute la surface des glaciers n’est composée que de glace », a pu constater Léo Decaux, en survolant les montagnes du Svalbard. Pourtant, les précipitations en neige n’ont pas diminué ces dernières années, au contraire. À cause du réchauffement climatique, les précipitations sont plus importantes mais la neige tombée ne peut se transformer en glace car les températures sont trop élevées. « Toute la neige fond en été », explique Léo Decaux. « Les glaciers survivent grâce aux ombres portées par les flancs des montagnes qui les bordent et aux avalanches. »
Un des glaciers de Longyearbyen, épais de dix mètres et vieux de plus de 800 ans. (Crédit photo : Eloïsa Patricio)
Un réchauffement climatique qui inquiète (presque) tout le monde
Depuis 20 ans, la température moyenne augmente de 1 à 1,2°C par décennie dans les îles du Svalbard. Un réchauffement climatique important lorsque l’on sait que la hausse moyenne de la température depuis l’ère pré-industrielle est de 0,8°C. Cette hausse significative, notamment due aux gaz à effet de serre, entraine donc la fonte des glaciers et de la banquise, censés réfléchir les rayons du soleil. Sans eux, les rayonnements sont absorbés par la terre et les océans, entrainant la hausse de la température de l’eau. Une augmentation du mercure qui accentue la fonte des glaces. Un véritable cercle vicieux.
Certains spécialistes prédisent la disparition de la banquise en été au pôle Nord pour 2020. Pour Léo Decaux, cette estimation est trop prématurée : « 2020 je n’y crois pas mais je pense que d’ici à 2100, on aura pris une claque ». Dans tous les cas, les dégâts sont déjà faits : le fjord du Spitzberg, l’île principale du Svalbard, ne gèle plus complètement en hiver depuis 2007. Cette fonte extraordinaire laisse présager de nouvelles routes maritimes. Une aubaine pour les compagnies pétrolières. L’Arctique, qui possède plus de 20% des réserves, pourrait bien devenir le futur premier fournisseur mondial. En attendant, « la mine de charbon n°7, au bout de la vallée, qui permet à Longyearbyen d’être indépendante en énergie et d’où s’échappe une épaisse fumée, tourne à perte », conclut Léo Decaux.
Un des glaciers de Longyearbyen, épais de dix mètres et vieux de plus de 800 ans. (Crédit photo : Eloïsa Patricio)
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