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#2/2 CYRIL DION : « LES RESPONSABLES POLITIQUES DOIVENT CONTRIBUER À LUTTER CONTRE LE RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE »

#2/2 CYRIL DION : « LES RESPONSABLES POLITIQUES DOIVENT CONTRIBUER À LUTTER CONTRE LE RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE »

AU FESTIVAL DU LIVRE DE MOUANS-SARTOUX, CYRIL DION, CORÉALISATEUR DE DEMAIN PARTICIPAIT À PLUSIEURS CONFÉRENCES AUTOUR DE NOS MODES DE VIE ET DE L’ENVIRONNEMENT. POUR BUZZLES, IL REVIENT SUR LA NÉCESSITÉ D’UNIR LES FORCES POLITIQUES ET CITOYENNES, AFIN DE CONSTRUIRE UNE SOCIÉTÉ ALTERNATIVE. 

Une étude du Ministère de l’environnement 2015 confirme l’importance que les Français accordent au changement climatique et à la pollution de l’air. En revanche, l’augmentation des déchets, la pollution de l’eau, l’érosion de la biodiversité sont perçues comme des problèmes moins importants. Constatez-vous l’émergence de cette conscience climatique ?

« On le voit avec tous les gens qui achètent plus bio qu’avant, ou qui sont plus soucieux d’avoir un peu d’électricité renouvelable, que ce soit avec des panneaux solaires ou en adhérant à Enercoop. Mais les gens ont besoin de relier ça, être écolo tout seul c’est une préoccupation un peu accessoire après celles concernant la sécurité, l’emploi, etc.

 

Pourtant, dans cette même étude, 51% des Français interrogés considèrent qu’il revient en priorité aux pouvoirs publics d’agir contre 18% aux ménages.  Il n’y pas une seule responsabilité, mais une responsabilité collective d’agir

« Aujourd’hui, avec Demain, on a essayé de montrer que, si on veut créer des emplois, par la transition énergétique notamment, ou faire en sorte que les gens aillent plutôt faire leurs courses dans les commerces locaux et indépendants, c’est au moins 1,8 millions d’emplois. Si on recycle plutôt que de mettre dans des incinérateurs ou des décharges, c’est encore 230 000 emplois. On voit que laisser le changement climatique s’aggraver, ça va faire de plus en plus de migrants, de plus en plus de conflits, de plus en plus de sentiment d’insécurité : on ne s’en sortira pas, parce que les choses sont totalement interdépendantes.

Aujourd’hui les médias ont vraiment une responsabilité qui est de ne pas seulement faire de l’information spectacle. Dire, par exemple, « il se passe ça, et il y a des gens qui ont décidé d’y répondre avec ça ». Là encore pour ne pas laisser les gens au milieu du gué, mais pour faire ce qu’on appelle en anglais de l’emporwement, de leur redonner du pouvoir, de réagir par rapport à ces situations. »

Quand on compare les Français à d’autres pays européens, comme la Suède ou la Norvège, on remarque qu’ils sont bien indisciplinés en écologie…

« Ce ne sont pas les mêmes consciences, on met trop de temps à se mettre en route, et c’est déjà un peu trop tard. Il se trouve que dans les pays du nord et les pays anglo-saxons, il y a une culture, une éducation à ça, un sens de l’intérêt général plus grand. Si on regarde tous les engagements des pays sur le changement climatique, on est à plus de trois degrés. On sait déjà qu’on peut encore arriver à deux degrés mais en dessous c’est à peu près impossible. Il y a déjà des choses pour lesquelles c’est trop tard ».

Les présidentielles arrivent. Nicolas Sarkozy déclarait récemment que l’Homme était arrogant de penser qu’il était responsable du réchauffement climatique. Qu’en pensez-vous ? 

« C’est de la provocation, pour quelqu’un qui en plus a mis en place le Grenelle de l’environnement… C’est purement électoraliste. Il sait que nombre des électeurs du Front National aiment prendre le contre-pied de la position dominante donc là il fait sa sortie climatosceptique. Non seulement c’est absurde, mais c’est profondément irresponsable. Aujourd’hui, on a besoin de mobiliser tout le monde. Plus largement, les responsables politiques doivent contribuer à lutter contre le réchauffement climatique. À nous de leur montrer qu’il y a des sujets fondamentaux et que s’ils n’en parlent pas, on votera pas pour eux. Pour ces élections, il est important qu’il y ait vraiment une mobilisation autour des candidats qui portent des vrais projets de société, et il y en a. J’adorerais que ces candidats se mettent ensemble pour avoir un vrai impact. »

C’est complètement contraire au système politique actuel…

« Le problème, c’est que ce système glorifie les égos personnels. Ce n’est pas de ça dont on a besoin en ce moment. On a besoin d’unité pour régler des problèmes qui sont graves, en faisant fi des couleurs politiques. Pour les élections présidentielles, nous allons lancer une campagne avec énormément d’artistes connus pour essayer de porter une parole différente. Il ne faut pas que le débat se focalise autour d’un certain nombre de sujets qui sont autour de la peur. »

Comment considérez-vous la Cop 21, qui est une initiative politique ?

« Le fait qu’à Paris, 195 pays aient dit qu’ils avaient conscience qu’il fallait rester en dessous 1.5 degré, même symboliquement, c’est très fort : ça dit quelque chose aux populations et aux entreprises. Mais le problème, c’est qu’après il faut que chaque pays se donne les objectifs adaptés, que chaque parlement ratifie et là on retombe dans les tactiques politiciennes qui sont compliquées. C’est là où les peuples sont hyper importants, ça veut dire que ça ne suffit pas qu’il y ait simplement un accord au Bourget, à la Cop 21, il faut qu’après les populations de chaque pays disent « oui il faut y aller, on veut y aller et on veut que les législations aillent dans ce sens-là. »

 

C’est donc votre projet de société ?

« On a des problèmes tellement énormes devant nous qu’on va avoir besoin de tout le monde et de l’énergie de tout le monde. Donc il faut réveiller cette énergie-là.  Ils ne vont pas tous se réunir bien sûr, mais il pourrait avoir des coalitions intelligentes, par exemple Mélenchon, Europe Ecologie Les Verts, Nouvelle Donne, Alliance écologique indépendante et pourquoi pas Corinne Lepage. Et déjà au premier tour, on pourrait être à 20% des voix. Donc on se rend compte qu’il y a une force potentielle qui est aujourd’hui extrêmement morcelée, qui pourrait émerger s’ils décidaient de le faire. Mais comme ils n’ont pas envie de la faire, il faut les forcer. En ce moment je les rencontre, car ils veulent que je les soutienne chacun personnellement, mais je veux les pousser à se rassembler. Même s’il y a des querelles d’ego, est-ce qu’on ne serait pas capable de créer une forme de coalition qui irait dans ce sens-là ? Après, au-delà de moi, il faudrait que leurs électeurs leur disent que dans le fond les projets qu’ils portent sont suffisamment proches pour qu’on puisse le faire ensemble. »

En quelques mots, pourquoi est-il nécessaire d’agir dès maintenant ?

Propos recueillis par Virginie Ziliani

Mariette Guinet

Elisa Montagnat

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